Non, je n’ai pas été formée en Inde… et pourtant je suis prof de yoga

Non, je n’ai pas été formée en Inde… et pourtant je suis prof de yoga

C’est une remarque qui ne se dit pas toujours à voix haute, mais qu’on devine parfois dans un regard, dans un ton, dans une moue un peu dubitative.

Genre : "Ah… tu ne t’es pas formée en Inde ?" 😳🤔😕

Une formation en France, c'est suspect. Comme s’il manquait un sceau d’authenticité, un tampon sacré validant la légitimité de l'enseignement.

Alors non, je ne me suis pas formée en Inde.
Et pourtant : je suis prof de yoga.

Le fantasme du yoga « authentique »

L’image du yoga véhiculée par les réseaux sociaux, les magazines ou certains discours bien rodés fait parfois croire que seule une formation à Rishikesh ou Goa donne accès à la « vraie tradition ».
Comme s’il existait un yoga originel à retrouver là-bas, au bout du monde, dans un ashram poussiéreux ou sur un rooftop au lever du soleil.

Mais ce fantasme-là est gênant à double titre.

D’abord parce que l’histoire du yoga est infiniment plus complexe que ce qu’on croit. Revendiquer un yoga « traditionnel », c’est oublier que le yoga, depuis ses origines, n’a jamais été figé. Il s’est toujours transformé, adapté, recomposé au fil des époques, des pays et des personnes.

Ensuite, parce qu’en voulant absolument coller à une image idéalisée du yoga, on peut finir par singer une culture qui n’est pas la sienne, dans un mouvement d'appropriation culturelle. Comme s’il fallait être plus indien que les Indiens pour enseigner le yoga en France. 

Ce qui fait un bon prof de yoga

Pour moi, la légitimité d’un enseignant ne se mesure pas aux visas dans son passeport. Elle ne se joue pas non plus dans la photo d’un "handstand" parfait face à la mer.

Elle se trouve ailleurs. 

Mon formation initiale s'est faite dans un studio d'ashtanga lillois et dans les montagnes de Chamonix en vinyasa et en yin, et j'ai rapidement cumulé plus de 500h de formation auprès de profs très différents. Mon apprentissage s’est construit autour de la philosophie et de la culture du yoga, d’une pédagogie claire, d’une conscience du mouvement, et d’un immense respect du corps.

J'ai rempli ma bibliothèque de livres sur l'anatomie, les concepts et la philosophie du yoga, livres dont j'ai usé les pages.

J’ai approfondi et élargi mes connaissances avec un DU de yoga à l’Université de Lille : « Diffuser et adapter les outils du yoga ».
Un diplôme qui croise les savoirs du yoga avec les sciences humaines, les sciences de l’éducation, la médecine, la psychologie…, qui interroge les liens entre yoga, santé, pédagogie et transformation personnelle, et qui vise, très concrètement, à adapter les outils du yoga aux réalités d’aujourd’hui. 

Pourtant, malgré tout ça, il m’a fallu du temps pour me sentir pleinement légitime.
J’ai creusé. J’ai ré-étudié la philosophie du yoga, les textes anciens. Je me suis plongée dans l’Ayurvéda, j’ai exploré tout ce qui pouvait, de près ou de loin, éclairer ma pratique. Je cherchais à bien faire. À être crédible. À être à la hauteur d’un idéal que je m’étais moi-même fabriqué.

Mais, peu à peu, le yoga m’a appris ce qu’il avait à m’enseigner — et c’était peut-être ça, le plus important : faire de soi ce qu’on est.
Ne pas chercher à incarner un modèle, mais à s’incarner soi-même.
C’est là que j’ai trouvé mon authenticité.
Et c’est là que j’ai compris que c’était suffisant. Et profondément juste.

Le yoga, comme vecteur de transformation

Alors je propose le yoga postural comme une porte d’entrée.
La pratique pour se reconnecter à soi, à son souffle, à ses sensations et émotions.
Pour s’observer, écouter ses limites, les rencontrer avec douceur.
Et laisser la magie du yoga opérer : un peu plus d’espace dans le corps, un peu plus de calme dans le mental, un peu plus de bienveillance et d'ouverture envers soi-même, et envers les autres.

C’est ça, mon idée du yoga. Celui que je vis et que j'essaie de transmettre.
Un yoga enraciné, incarné, ancré dans la vie de tous les jours.
Pas dans une carte postale.

PS : J'aime cette photo prise par une de mes élèves pendant un séjour yogaetcterra. J'étais blessée, mais j'ai quand même pratiqué, j'ai enseigné, en respectant cette nouvelle limite, parce que j'avais autre chose à transmettre qu'une posture parfaite 😉

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